Pouvoir comptable et risque marchand : la joaillerie Briers-Heusch-von Cassel (Francfort-sur-le-Main, années 1620)
Le texte prend comme objet un groupe joaillier actif dans les années 1620. Bien que l’horizon de son activité soit mondial, et renouvelé par les compagnies des Indes nord-européennes, le cadre de l’étude se restreint à l’Europe pour concentrer le regard sur les sources comptables, qui questionnent immédiatement savoirs et asymétries de savoirs (mercantiles, artisanaux) existant au sein de ce groupe. En apparence très simple (achat de pierres brutes à Anvers ou Amsterdam, façon de celles-ci à Anvers, Francfort ou autour de cette ville, vente aux cours nord-européennes dont surtout la cour impériale), ce commerce frappe par l’importance des risques qu’il encourt : seule l’importance des profits permet d’éviter une crise de trésorerie provoquée par la lenteur des ventes et des recouvrements, alors que les crédits à l’achat ne peuvent être indéfiniment prolongés. L’ajustement à la demande, dans cette course contre la montre, ne passe pas par le prix mais par la circulation européenne des joyaux proposés à la vente ; la gestion du risque, elle, passe par la division de la propriété des joyaux en parts indéfiniment reconfigurables. Cette organisation – couverture de l’espace et division des risques – se caractérise à la fois par son ouverture aux investissements extérieurs et par la nette hiérarchie interne au groupe qu’elle organise. Elle repose en définitive sur la mise en place et le maniement, depuis Francfort, d’un système comptable non seulement complexe mais hermétique à plusieurs membres du groupe – un système de pouvoir et de contrôle, dont l’existence questionne le primat accordé à des notions telles que le droit ou la confiance dans la description de réseaux marchands modernes.
Mots-clés
- Europe
- histoire moderne
- marchands
- comptabilité
- crédit
- confiance