L’histoire des drogues en France : un nouvel état des lieux

Par Erwan Pointeau-Lagadec
Français

Malgré un dynamisme retrouvé depuis quelques années, l’historiographie française des drogues n’a fait l’objet d’aucun état des lieux depuis près de trente ans. L’inexistence d’une cartographie actualisée de la littérature complique toute entreprise de positionnement thématique, méthodologique et épistémologique au sein du champ, fragilisant du même coup la capacité des historiens à produire des travaux susceptibles de nourrir le débat public en matière de substances psychotropes et de toxicomanie. La présente contribution vise à combler ce manque en proposant une généalogie de la littérature historique sur les drogues en France, puis une analyse de ses principaux axes structurants. Dans un premier temps, nous verrons ainsi que, née dans les années 1980 de travaux sur l’alcool plutôt que sur les stupéfiants, l’historiographie nationale des drogues a connu une phase d’émulation et de structuration au tournant des années 1990, avant de retomber dans une certaine apathie jusqu’à une date récente. Une entreprise de recension critique nous permettra, dans un second temps, d’identifier trois des principales caractéristiques de ce champ de recherche : le tropisme des historiens français pour l’Hexagone contemporain, un déséquilibre marqué en faveur des travaux consacrés aux substances licites et la surreprésentation des approches normatives et sanitaires de la question des produits stupéfiants. En conclusion, nous proposons trois pistes de travail à suivre pour participer au renouvellement de la littérature sur le sujet : celle du processus de normalisation des substances illégales, celle du genre des acteurs du monde la drogue et celle liée aux enjeux coloniaux et postcoloniaux de la question.

Mots-clés :

  • France
  • époque contemporaine
  • drogues
  • stupéfiants
  • historiographie
  • état de l’art