Les droits fragiles. L’insécurité juridique des huguenots au temps des guerres de Religion
Cet article explore la question des droits reconnus aux protestants dans la France des guerres de Religion. Il tente de tenir ensemble deux moments contradictoires mais constitutifs de l’expérience huguenote : l’obtention de droits et leur soudaine révocation au cours des dernières décennies du XVIe siècle. Il s’interroge sur les effets de ces deux séquences, très rapprochées dans le temps, d’octroi et de privation de droits. Un premier temps est consacré à l’étude de la manière dont les huguenots ont obtenu leurs droits et incorporé leur appartenance et leur soumission à l’État royal par l’intermédiaire de la rédaction de très nombreuses plaintes, dont le contenu, loin d’être confessionnel, se révèle de fait très sécularisé. Il s’agit de mettre en lumière, au cœur du XVIe siècle, la quête menée par les huguenots qui ne réclament aucun bien matériel mais sont engagés dans une « lutte pour la reconnaissance », qui les conduit à se placer dans les mains de l’État royal à qui ils doivent leur onction de « sujets » et la reconnaissance de leurs droits confessionnels comme minorité. Le deuxième temps de l’article s’arrête sur la soudaine révocation des droits des protestants, en 1562, 1568 et surtout 1585 : quels sont les effets, au niveau des pratiques mais aussi des représentations (du pouvoir, du temps), de cette soudaine perte du « droit d’avoir des droits » ? Quelles sont les modalités par lesquelles on prive un groupe minoritaire de ses droits mais aussi de ses biens ?
Mots-clés
- France
- XVI e siècle
- reconnaissance
- huguenots
- minorité
- plaintes
- coexistence religieuse
- illégalisation