Une émulation à usage local. Les concours d’histoire des sociétés savantes de province au XIXe siècle
La tradition du concours académique, qui connut sous la Révolution une brève éclipse, prit après 1800 un nouvel essor. En province, les cercles d’études fondés et animés par des représentants de la bourgeoisie diplômée organisaient des concours scientifiques, littéraires ou historiques. L’objectif était de susciter un climat d’émulation par la mise en jeu de récompenses honorifiques. Mais il s’agissait aussi, pour ces notables provinciaux, très conscients de ce qu’ils n’avaient pas les moyens de contester l’hégémonie culturelle de la capitale, de créer dans leur environnement immédiat une scène intellectuelle sur laquelle ils pourraient s’illustrer. Cependant, l’analyse d’un échantillon de plus de 600 lauréats des concours d’histoire organisés par des sociétés d’émulation provinciales montre que la formule du concours attirait surtout des représentants de la toute petite bourgeoisie d’origine populaire. Pour ces amateurs de recherche historique qui, en raison de leur appartenance aux fractions inférieures de la bourgeoisie, étaient maintenus à l’écart de la sociabilité savante, la participation à un concours offrait la possibilité de faire une timide incursion dans cet univers très hermétique. On s’est intéressé aux stratégies déployées par les organisateurs de concours pour modérer les ambitions intellectuelles de ces historiens de modeste extraction.
Mots-clés
- France
- XIX e siècle
- émulation
- concours académique
- sociétés savantes
- province
- vie intellectuelle
- histoire locale