De la ville au territoire et au-delà : espace et régulation du commerce dans l'électorat de Mayence (seconde moitié du XVIIIe siècle)
Cet article étudie le cas de la principauté de Mayence dans la seconde moitié du XVIIIe siècle
pour éclairer la dimension spatiale de la régulation économique. Dans cette ville, la corporation
des merciers et la guilde des marchands défendent un idéal de répartition égale dans l’espace
urbain des boutiques, idéal qui est largement partagé par les autorités de l’électorat, mais qui est
perturbé par la présence de colporteurs et de commerçants juifs.
À une échelle plus petite, les marchands du Handelsstand défendent leurs revendications en
soulignant une opposition nette entre l’intérieur (le territoire électoral) et l’extérieur (les autres
États dans l’Empire et en Europe). Si cette opposition répond aux objectifs de la politique économique du gouvernement, elle ne correspond pas aux pratiques commerciales de ces marchands
dans lesquelles le territoire occupe une position mineure. La frontière représente pour eux une
ressource institutionnelle et économique qui fonde leur profit et légitime un privilège les protégeant
contre la concurrence des marchands étrangers. Si les demandes des corporations marchandes
de Mayence sont souvent suivies par le gouvernement, des différends apparaissent à la fin du
XVIIIe siècle quand les autorités utilisent le privilège comme un outil non de protection des marchands locaux mais de stimulation de la concurrence. Ces tensions révèlent fondamentalement
que milieux marchands et autorités défendent ainsi deux conceptions de l’espace économique
qui sont largement antagonistes.
MOTS-CLÉS
- Allemagne
- XVIII e siècle
- régulation économique
- corporations
- frontières
- espace
- territoire