Catégorisation et stigmatisation policières à Sheffield au milieu du XIXe siècle
La ville du XIXe siècle était souvent présentée comme le terrain privilégié de la criminalité, alors que les autorités urbaines tentaient de montrer, au contraire, que le crime provenait toujours de l’extérieur de la cité. Cet article prouve que la présentation des statistiques criminelles de la ville anglaise de Sheffield était manipulée de diverses manières, dont le but était toujours de montrer le criminel comme un «autre». Les rapports des villes se conformaient aux exigences nationales en comptabilisant les criminels et leurs repaires, mais ils allaient aussi bien au delà de cette simple statistique. L’information sur le lieu de résidence, la nationalité, et le niveau d’instruction étaient présentés de manière à essayer d’établir une frontière intérieure entre la «vraie» ville et certains de ses habitants, jugés responsables de la majorité des crimes. La «catégorisation» poursuivait le but d’isoler symboliquement une classe criminelle peu apparente. La subdivision presque maniaque de certains types de crimes en plusieurs petites sous-catégories permettait de fractionner des chiffres généraux peu acceptables, de les minorer afin de rendre les résultats plus rassurants. Les rapports des villes visaient à créer l’image d’une police incorruptible et professionnelle, réussissant à sécuriser la ville en la séparant d’une menace criminelle qui était essentiellement définie comme extérieure.